07 Sep Suite à une blessure…Qui devrais-je consulter?
Suite à une blessure, je me demande comme acupuncteur, à quels stades de la douleur et de l’inflammation l’ ostéopathe peut-il intervenir?
-Valérie Léonard, Ostéopathe :
Notre travail, en tant qu’ostéopathe, consiste à trouver la cause de la douleur et de l’inflammation afin de la normaliser pour aider le corps à retrouver sa fonction normale. On fonctionne un peu comme un garagiste. Lorsque votre véhicule commence à faire un bruit, vous l’amenez au garage pour qu’avec une inspection, on puisse trouver et régler la source du problème. En tant qu’ostéopathe, on effectue des tests cliniques pour déterminer la source de la douleur et de l’inflammation afin d’intervenir au niveau des structures problématiques.
Nous intervenons à tous les stades de douleur et d’inflammation. Par contre, c’est leur intensité qui va décider du type dintervention ostéopathique. Si la condition est plus aiguë, nous allons probablement adopter une approche plus tissulaire, viscérale ou crânienne et si la condition est devenue chronique, de différentes interventions seront priorisées.
Dans tous les cas, on travaille avec le corps de notre patient afin de l’aider à retrouver un alignement et de la mobilité aux structures qui sont atteintes.
-Olivier Roy, Acupuncteur :
Très intéressant Valérie. Par quels mécanismes ostéopathiques pouvez-vous aider à soulager la douleur chez vos clients?
-Valérie Léonard, Ostéopathe :
Les principes fondamentaux de l’ostéopathie ont été énoncés par Andrew Taylor Still.
1. Le rôle de l’artère est absolu : Tout comme le système nerveux, le système circulatoire (artériel, veineux et lymphatique) doit bien fonctionner afin de garder notre corps en bonne santé. Les structures du corps doivent être bien vascularisées et nourries pour faire leur travail adéquatement.
2. La structure gouverne la fonction (et vice-versa) : Il existe une relation très étroite entre la structure et sa fonction. Lorsqu’une structure est affectée par un manque de mobilité ou autre, il en découle un dérèglement de sa fonction. De même que si une fonction d’un tissu ou organe n’est pas optimale, la structure peut se voir changer pour s’adapter à la fonction modifiée.
3. Le corps est une unité fonctionnelle : Dans le corps, tout est relié; toutes les structures, sur tous leurs plans (physique, physiologique et psychologique) sont interdépendantes les unes des autres. Une perturbation dans un tissu (musculaire, osseux, nerveux, viscéral) va avoir des répercussions sur tous les plans du corps humain.
4. Le corps a une tendance naturelle vers l’auto-guérison : Le corps est en constante recherche de son homéostasie (état d’équilibre du corps à tous les niveaux). Des interventions ostéopathiques dispensées, le corps prends ce qu’il a besoin pour se rééquilibrer et revenir à un état d’équilibre afin qu’il ait une fonction optimale pour continuer à se défendre et à se guérir.
Quelques effets physiologiques de l’ostéopathie démontrés par la science
La blessure des tissus selon l’ostéopathe serait en fait une obstruction du flot des liquides du corps, caractérisée par un changement soit au niveau de la taille, la texture, la fonction d’un tissu du corps humain. De multiples études cliniques auraient démontré que les techniques myofasciales permettent de diminuer les douleurs et d’augmenter les mouvements des structures en augmentant le nombre de fibroblastes dans les tissus et en diminuant la quantité des interleukines pro inflammatoires sécrétées par les lymphocytes.
En ce faisant, il y a également une augmentation de la capacité des tissus à guérir les traumatismes auxquels ils ont été sujets. Ces techniques permettent aussi d’équilibrer les tensions membraneuses et crâniennes, ce qui aide à traiter les dysfonctions somatiques chroniques.
Les techniques crâniennes ont pour elles démontré avoir un effet sur la plasticité corticale et sur la modulation des signaux du système nerveux autonome ce qui aide à traiter, entre autres, la fibromyalgie en ostéopathie. Aussi, il a été attesté par électro-encéphalogramme (EEG) et par neuro-imagerie que les techniques crâniennes ont un effet immédiat en normalisant les centres de traitement et de modulation de la douleur.
Pour ce qui est des techniques structurelles, il a été prouvé avec des tests sur la variabilité cardiaque qu’en redonnant une mobilité optimale à certaines structures, les vertèbres cervicales et au niveau du sacrum par exemple, on peut avoir un effet sur le système nerveux autonome en rétablissant un équilibre sympathico-vagal et qu’il y a aussi des effets positifs sur la mobilité de toutes les autres structures reliées à celles-ci (ligaments, muscles, membranes, nerfs périphériques, viscères innervées par le système nerveux autonome).
Des effets positifs de l’ostéopathie sur la santé mentale ont aussi été relevés par plusieurs clients depuis plusieurs années, mais des études plus approfondies sont nécessaires pour valider les mécanismes d’action des techniques ostéopathiques à ce sujet.
-Olivier Roy, Acupuncteur :
Quand pensez-vous à référer en acupuncture Valérie?
-Valérie Léonard, Ostéopathe :
Les clients sont référés en acupuncture par l’ostéopathe pour plusieurs raisons:
Premièrement, lors de la phase douloureuse aiguë accompagnée de réactions inflammatoires des clients alors que leur corps est en hyper-réaction et que les systèmes sympathiques et parasympathiques auraient besoin d’être équilibrés avant de débuter des interventions plus manuelles.
Deuxièmement, lors de la phase de douleur chronique, alors qu’il faut quelques fois que le système nerveux de leur corps réagisse à une nouvelle approche lors de l’atteinte d’un plateau thérapeutique en ostéopathie.
Aussi, plusieurs clients ressentent des effets bénéfiques de l’acupuncture lorsqu’ils ont des problèmes de céphalées, sommeil, d’anxiété, digestifs, respiratoires (tels que l’asthme ou des allergies) et même pour divers dérèglements hormonaux diagnostiqués.
-Valérie Léonard, Ostéopathe:
À quel moment est-il optimal d’intervenir par l’acupuncture, sur une douleur apparue suite à une blessure?
-Olivier Roy, Acupuncteur:
L’acupuncture est utile autant en cas de douleurs aigues que douleurs chroniques. Dans une étude menée à l’urgence, l’acupuncture a été démontré supérieure à la morphine par intraveineuse pour la douleur aiguë en terme de sûreté, d’efficacité et de rapidité d’action. Pour ce qui est de la douleur chronique, les gens sont souvent surpris de ce qu’une série de traitements d’acupuncture peut arriver en terme de résultats. L’efficacité et la durabilité du traitement d’acupuncture semble être relié à la dose, c’est-à-dire que la plupart des études ayant testé l’acupuncture évalue son efficacité sur une période d’environ 15 traitements. On a pu démontré que 90% des effets positifs d’une série de traitements en acupuncture sont conservés 1 an après le dernier suivi. »
-Valérie Léonard, Ostéopathe:
Quand pensez-vous à référer en ostéopathie comme acupuncteur Olivier?
-Olivier Roy, Acupuncteur:
Je réfère régulièrement en ostéopathie les patients qui vivent des épisodes de douleurs, que celle-ci soit aiguë ou chronique. En fait, dès que je soupçonne une problématique liée aux mécanismes de respiration primaire, c’est-à-dire une situation où le patient a reçu un choc physique, je vais systématiquement conseiller de faire vérifier la régularité de la circulation du liquide cérébro-spinal chez l’ostéopathe. L’effet de l’acupuncture sur la circulation du sang et la régulation de l’inflammation, la douleur, en sera directement bonifié. Je réfère souvent également les jeunes enfants et les femmes enceintes à compléter un suivi en acupuncture par la consultation en ostéopathie.
-Valérie Léonard, Ostéopathe:
Quelles sont les mécanismes permettant d’expliquer le fonctionnement du traitement d’acupuncture sur la douleur?
-Olivier Roy, Acupuncteur:
Le contrôle de la douleur
L’acupuncture agit sur la douleur par différentes voies de modulation. Le mécanisme le plus impressionnant mis en lumière concerne certainement la reconnection -permanente- de nouveaux réseaux électriques dans le cerveau suite aux traitements d’acupuncture. Une étude ciblant le traitement du tunnel carpien a permis de mettre en évidence ce mécanisme spectaculaire, grâce aux imageries par résonance magnétique fonctionnelle.
Des voies neuronales empruntées par la stimulation des points d’acupuncture ont été identifiées, de la colonne vertébrale jusqu’à la désactivation de centres cérébraux de la douleur. Un certain nombre de régulateurs biochimiques impliqués dans la réduction de la douleur sont influencés par la stimulation des points d’acupuncture, incluant l’activation de substances opioides endogènes, sécrétés par l’organisme, la modulation de l’ATP, l’adénosine, la substance P, les Natural Killer Cells, pour en nommer quelques uns. L’acupuncture modulerait même l’expression du code génétique.
La modulation de l’inflammation
L’effet de l’acupuncture sur l’inflammation aurait été mis en évidence par divers marqueurs, dont certaines cytokines pro-inflammatoires. L’acupuncture LASER serait notamment responsable de la modulation à la baisse de la prostaglandine E2, la protéine C-reactive, ainsi que l’interleukine-6
La stimulation de la régénération des tissus
Les études sur l’humain, mais aussi sur les souris, les chats, les chiens et les chevaux ont permis de démontrer que l’électroacupuncture, c’est-à-dire la stimulation électrique sur aiguilles, permet de stimuler la mise en circulation de cellules souches mésechymateuses dans la circulation sanguine.
Cela veut dire que des cellules indifférenciées de l’organisme, normalement stockées dans la moelle osseuse, sont rendues disponibles pour régénérer les tissus blessés.
-Valérie Léonard, Ostéopathe:
Y-a-t-il une théorie unifiée permettant d’expliquer le fonctionnement du traitement d’acupuncture en général?
-Olivier Roy, Acupuncteur:
Il y a en fait plusieurs théories. L’acupuncture étant une médecine intégrative appelée à intervenir dans plusieurs pathologies très différentes, il n’y a a pas une seule théorie expliquant tout ce que fait l’acupuncture sur le corps humain. Selon mes intérêts personnels, puisque mes cours préférés à l’école ont toujours été les cours de physique, la théorie plus séduisante d’un point de vue fondamental selon moi est la théorie basée sur la 4e force fondamentale de l’univers, c’est-à-dire : l’électromagnétisme. Tout ce qui existe s’exprime par un champs électromagnétique qui interagit avec son environnement. Par définition, les points d’acupuncture sont des zones de moindre résistance électrique. -Des zones de faiblesses, donc- Les aiguilles bi-métalliques dotées d’un manche de solénoïde influencent le champ électromagnétique chez le vivant et représentent en fait une diode -une résistance électrique- dans le circuit de bioélectricité du corps humain.
Ainsi, les « résistances-aiguilles », placés sur les plus grands points de faiblesses du corps humain, rétablissent une résistance normale des tissus et coincïdemment, une circulation optimale à l’intérieur de ceux-ci, capable de générer des réactions en chaînes à distance, par exemple sur une chaîne musculaire. Cette théorie que j’aime bien n’est certainement pas celle qui fait l’unanimité en 2020!
Dernièrement, plusieurs articles scientifiques ont publié en utilisant des titres comme l’acupuncture réorganiserait les connexions électriques dans le cerveau. (De l’anglais, « Acupuncture « rewires » the brain ») Voici une citation de mon collègue John McDonald, acupuncteur et chercheur.
« Oui, l’acupuncture est capable de remodelage du cortex somatosensoriel en cas de douleur chronique comme l’a démontré Vitaly Napadow, mais il ne faudrait pas là « réduire » le fonctionnement de l’acupuncture à cette découverte. Ce qui est clair, c’est qu’il y aurait dans les mécanismes du traitement d’acupuncture des interactions très complexes entre récepteurs, médiateurs et voies de régulations, en plus de la modulation d’expression de gènes spécifiques. Ça peut-être très tentant de sauter aux conclusions simplistes et dire :
« il s’agirait en fait du nerf vague »,
« il s’agirait en fait des vasodilatateurs »,
« il s’agirait en fait des gazotransmetteurs »
« il s’agirait en fait des opioïdes endogènes »,
« il s’agirait en fait des voies de médiation de l’adénosine et des récepteurs prurinergiques »,
« il s’agirait en fait de modulation de la neuroplasticité »,
« il s’agirait en fait de la modulation immunitaire »…
Bien que tout ces processus ont été démontrés cliniquement, il n’y aurait pas encore de théorie unifiée qui explique tout ce que l’acupuncture peut faire. Par exemple, le point Zu San Li – Estomac 36- a plus de 120 indications thérapeutiques, impliquant tous les systèmes organiques du corps humain à divers degrés, ce qui implique que ces 120 actions sont tous liées d’une manière ou d’une autre puisqu’elles se produisent en cascade à la suite d’un seul stimulus. S’il n’y aurait qu’un seul élément de pivot central, ce pourrait être le cycle circadien, qui s’exprime dans le noyau de toutes les cellules du corps et toutes ces « horloges » cellulaires communiquent d’une manière ou d’une autre entre elles via de nombreuses voies. Il y aurait des données probantes maintenant significatives que l’horloge du cycle circadien régule presque tous, sinon tous, les systèmes organiques. Lorsque l’acupuncture « harmonise » les organes digestifs, tels que le foie et le pancréas, peut-être synchronise-t-elle en fait toutes les horloges cellulaires de ces organes, et lorsque toutes les cellules du corps humain fonctionnent sur le même fuseau, on expérimente la santé optimale. Il y a maintenant des données directes d’expérimentation animale indiquant que l’acupuncture module les gènes et les protéines dans le noyau suprachiasmatique, qui est en fait le maître horloger de toutes les horloges du cycle circadien. »
-John Mcdonald, Acupuncteur et chercheur
Retrouver son X
C’est pourquoi si j’avais à faire une analogie avec un autre métier, si l’ostéopathe était le garagiste, l’acupuncteur est aussi un mécanicien, peut-être plus précisément l’horloger du corps humain, celui qui ajuste le « timer » des cellules du corps humain, qui s’activeront à l’unisson au rythme des cycles circadiens, une fois régularisées en leur centre.
Ce que ces deux professions ont en commun donc, c’est le travail sur la mécanique du corps humain, tant suite à une blessure que pour toute autre raison de consultation. Lorsque le redressement et la mise au point sont bien faits, le corps humain reprend ses fonctions normales plus facilement suite à une blessure.
Sorry, the comment form is closed at this time.